Crises politiques: nos voisins font-ils mieux ? par Guy MALHERBE, ancien député de l’Essonne
Faute de majorité claire, la France est dans une crise politique sur laquelle plane l’ombre de la dette. Une bonne raison d’aller voir hors de nos frontières ; comment font d’autres démocraties européennes confrontées à des difficultés similaires ? Belgique, Italie, Allemagne, Espagne, Royaume-Uni, y a-t-il des leçons à tirer ?
Comme le dit l’adage : « Quand je m’observe , je m’inquiète . Quand je me compare je me rassure « . A chacun de voir la conclusion qu’il peut tirer de cette comparaison.
C’est ce que la revue, LE UN hebdo, a fait en allant questionner des observateurs: universitaires, journalistes, chercheurs, de chacun de ces pays. La revue a consacré un numéro entier à cette question, en voici un résumé.
Un tour de l’Europe, qui débute par la Belgique et son goût pour la dilution du pouvoir, montre qu’aucune Constitution n’offre de solution miracle face aux crises économiques ou à la montée des oppositions d’extrême droite, au plus haut en Allemagne, en Angleterre et en France. Chacun bricole avec ses outils institutionnels en tentant de réduire l’écart grandissant entre les partis traditionnels et leur électorat. Notre tour d’Europe montre qu’aucune Constitution n’offre de solution miracle face aux crises politiques, économiques ou aux montées d’extrême droite en Allemagne, en Angleterre et en France.
En BELGIQUE, le pouvoir n’existe pas.
En France, le pouvoir existe, en Belgique, non. Au fil du temps les différentes réformes ont transféré le pouvoir à tout le monde. Un peu pour les Wallons, un peu pour les Flamands, un peu pour les germanophones et même pour les Bruxellois. Les gouvernements régionaux se partageant des compétences avec des gouvernements communautaires. Tous sont pourvus de leurs assemblées et de leur exécutif, de leur zone d’influence, de leur bureau, de leur voiture et de leur titre.
Il y a bien un gouvernement fédéral mais il est fait de bric et de broc, une coalition formée après d’interminables négociations entre les partis vainqueurs des élections. Le mot vainqueur est à relativiser, aucun parti n’a jamais la majorité absolue, la composition d’un gouvernement, opérée en secret et en coulisses, ne se fait qu’en abandonnant la majeure partie de son programme. Dès lors, quand un gouvernement existe, c’est pour mener une politique résultant d’une opération visant à soustraire, à rétrécir, à diminuer toutes les idées défendues à grand renfort de formules et de slogans durant la campagne électorale.
La Belgique a battu un record mondial en restant 541 jours sans gouvernement de plein exercice, le gouvernement sortant a géré les affaires courantes. Mais, le pays n’a pas sombré dans le chaos, ce qui illustre la robustesse de son administration et de ses institutions fédérées.
Le pouvoir en Belgique ne sert pas à donner les grands caps de l’avenir d’une nation, car il n’y a ni nation réelle, ni cap à tenir. Les Belges ne savent pas trop qui ils sont, ni où ils veulent aller, et ils sont plutôt heureux comme ça. En Belgique, la population s’occupe peu du pouvoir qu’elle observe sans passion, indifférente, résignée. Un pays sans pouvoir est un cadeau, c’est l’immobilisme. Mais les Belges suivent avec passion la politique française qui leur apparaît comme une zone de guerre, un chaudron ou s’exprime les passions les plus extrêmes, un chaos pré révolutionnaire car ils viennent y passer leurs vacances.
En ALLEMAGNE, un remède miracle, c’est la culture du compromis.
C’est la stabilité qui caractérise le système politique allemand, du moins en comparaison à d’autres régimes parlementaires. Le système allemand est complexe, hérité d’une période d’après-guerre ou l’objectif principal était d’empêcher la transformation d’une démocratie en dictature.
En conséquence, le système allemand est fondé sur la répartition maximale du pouvoir. D’abord entre les Länder et le niveau fédéral, puisque l’Allemagne est une démocratie fédérale, puis entre les partis étant donné qu’une alliance entre plusieurs partis est nécessaire pour former un gouvernement. L’objectif : éviter que les voix minoritaires ne soient effacées avec un scrutin à la proportionnelle.
Chaque électeur dispose de deux voix, l’une pour un candidat, et l’autre pour une liste présentée par parti. Le parti arrivé en tête engage ensuite des pourparlers exploratoires avec les formations susceptibles de s’allier. Une fois les alliés trouves les négociations pour un contrat de coalition sont engagés, cela peut durer longtemps. Ce contrat de coalition liste les arbitrages budgétaires et toutes les dissensions qui pourraient exister en leur apportant une solution de compromis. Il va servir de feuille de route au gouvernement à venir. Le dernier en date était long de 146 pages et il a été négocié à huis clos pendant un mois. Le compromis est véritablement le cœur du réacteur du système politique allemand.
Si depuis 1949, ce système électoral a permis aux deux grandes formations politiques, la CDU/CSU et le SPD d’être au centre de coalitions gouvernementales pour gouverner, par alternance, en 2005 leur perte d’influence a nécessité la mise en place de la Grande coalition CDU / CSU – SPD d’Angela Merkel (2005-2021), puis la coalition « feu tricolore « : SPD-Verts- FDP. Mais aujourd’hui l’Allemagne n’est pas immunisée au changement politique qui bouleverse l’Europe et notamment à la fragmentation du paysage politique. Comme en France, l’extrême droite incarnée par l’AFD et la gauche radicale ont réalisé des poussées très importantes. Ainsi, depuis 2024, la coalition CDU-SPD ne rassemble pas une majorité des voix des électeurs, en revanche ils forment une majorité des sièges au Bundestag.
L’exigence du compromis a obligé les deux partis à réévaluer leurs lignes rouges. Un blocage à la française ne semble pas envisageable en Allemagne dans l’immédiat. Certes, la poussée des extrêmes va rendre la constitution de coalitions stables de plus en plus difficiles, mais le compromis reste toujours au cœur du jeu politique. C’est pour cette raison, peut-être, que les Allemands conservent une grande confiance dans les institutions de la démocratie représentative parlementaire, bien plus importante que celle que les Français leur accorde.
Au ROYAUME UNI, un bipartisme affaibli.
Le régime parlementaire britannique peut-il être considéré comme stable, au regard des récentes crises politiques traversées par le pays ?
Surtout, Si on fait référence à l’année 2022, qui a vu se succéder trois Premiers ministre en l’espace de quelques mois seulement: Boris Johnson, Liz Truss, Rishi Sunak. Ce feuilleton politique signifie-t-il pour autant que le système parlementaire anglais est en crise ? Rien indique que cela soit le cas. Le Royaume-Uni a toujours connu des drames politiques sans que ceux-ci mettent en péril cette tradition parlementaire qui veut que le gouvernement émane du Parlement. La confiance du Parlement demeure nécessaire à la survie de l’exécutif.
Mais, si les élections législatives se sont soldées par l’obtention d’une majorité écrasante pour le parti travailliste, un mauvais résultat pour les conservateurs et une progression en particulier pour le parti nationaliste d’extrême droite. Cela est dû au système électoral britannique uninominal à un tour où le candidat arrivant en tête des suffrages dans une circonscription l’emporte même s’il n’a pas la majorité absolue. Avec 34 % des voix, le parti travailliste obtient 2/3 des sièges au Parlement. Dans ces conditions, le mandat démocratique qui incombe aux travaillistes est relativement restreint.
Ce système électoral assez peu controversé lorsque les deux principaux partis dominaient réellement les élections et comptabilisés à eux deux 90 % des voix, de l’après-guerre au milieu des années 70. Mais, avec l’apparition du parti des libéraux démocrates, du parti national écossais, des Verts, et de l’extrême droite de Réforme UK qui ont gagnés en popularité sans obtenir beaucoup de sièges supplémentaires, l’aspect disproportionné de ce mode de scrutin a été pointé du doigt en lui reprochant son manque de démocratie ou de représentativité. Aujourd’hui, en terme de répartition des voix, ce système s’apparente à un multipartisme, alors qu’il est, en considérant l’attribution des sièges au Parlement, encore résolument bipartite.
Sera-t-il réformé ? Ces défenseurs font valoir l’avantage d’avoir un gouvernement « fort » issu d’un seul parti disposant d’une majorité confortable au Parlement. Ils mettent en avant la responsabilité démocratique, les électeurs ne votent pas juste pour un député, mais en faveur ou contre le gouvernement actuel qui doit rendre des comptes. De plus, l’émergence d’une coalition supposerait des concessions de la part des parties concernées, ce qui pourrait être perçu comme une forme de trahison des promesses électorales.
Comme dans les autres pays européens le modèle britannique ne se porte pas formidablement bien. Il partage des problématiques communes avec la fragmentation du système des partis, le défi des partis politiques populistes d’extrême droite et de gauche radical, et un sentiment profond de déception à l’égard des partis traditionnels. Des questions qui traversent tous les pays européens.
En ITALIE : une expérience qui illustre avant tous les effets corrosifs d’une crise de la représentation.
« En Italie, il y a rien de plus définitif que le provisoire » ,selon la formule d’un journaliste. Elle résume un trait constitutif du système politique et institutionnel italien : la crise y a longtemps été le mode ordinaire de fonctionnement. Elle est le fruit d’une succession de crises gouvernementales, en raison à la fois du régime parlementaire faiblement rationalisé et d’une classe politique qui a fait de l’instabilité sa méthode et la condition de sa survie.
L’Italie, depuis l’arrivée de Georgia Melanie à la tête de l’exécutif, semble avoir rompu le cycle de l’instabilité chronique. Mais cette stabilité résulte d’une conjoncture politique et économique qui est l’aboutissement d’une recomposition profonde du système des partis. D’abord, une réforme électorale introduisant une dose de représentation majoritaire dans un mode de scrutin principalement proportionnel a permis de transformer un paysage politique plutôt fragmenté en un système bipolaire marqué par l’alternance entre deux coalitions de centre droit et de centre gauche.
Ensuite , la nomination de deux gouvernements techniques, en 2011 de Mario Monti, ancien commissaire européen, à la suite de l’échec deSilvio Berlusconi à résoudre la crise financière de la dette , et en 2021, de Mario Draghi, ancien président de la BCE , à la suite de l’incapacité du Mouvement 5 Étoiles de Beppe Grillo à passer de la contestation antisystème, populiste, écologiste très critique de la classe politique traditionnelle à la gouvernance malgré son triomphe aux élections législatives et son association avec Matteo Salvini . Le gouvernement Draghi d’union nationale pendant la Crise de la Covid rassemble une large majorité parlementaire seule Giorgia Meloni et son parti Fratelli d’Italia reste dans l’opposition, mais cette majorité d’union nationale éclate en 2022 à cause de la défection du Mouvement 5 Étoiles.
Des élections anticipées sont organisées en 2022 à un moment où les clivages et les identités politiques sont fortement brouillés et la fracture entre élus et électeurs est forte malgré les importantes réformes mises en place par ces gouvernements d’experts et Giorga Meloni avec son parti, héritier du parti neofasciste Movimento Sociale Italiano, gagne ces élections en promettant le retour à la démocratie face à la tyranie des technocrates. Ce résultat électoral fonde la stabilité actuelle. Mais rien ne permet d’affirmer que cette stabilité est acquise car le système électoral, encore à forte dominante proportionnelle, contraint les partis à bâtir des coalitions avant,ou après, les scrutins. Surtout, le taux d’abstention enregistré en 2022 de 36% révèle une fracture démocratique profonde et illustre avant tout,une crise de la représentation qui érode les fondements mêmes de la démocratie italienne. Comme en France, la désagrégation des partis traditionnels a favorisé le tripartisme et la poussée des extrêmes et, par conséquent, l’instabilité gouvernementale.
Au fond, l’expérience italienne montre que l’instabilité d’un régime tient moins aux règles constitutionnelles qui l’organisent que dans l’incapacité des forces politiques à porter des idées qui rassemblent les citoyens autour de valeurs communes. En renonçant à ce rôle éducatif et fédérateur, les partis laissent le champ libre à la tentation de « l’homme providentiel ».
En ESPAGNE, un heureux concours de circonstances.
Le paysage politique actuel en Espagne et inédit. En quoi ? Le système politique espagnol est strictement parlementaire, au sens où c’est le parlement qui choisit le premier ministre. Ce qui compte pour former un gouvernement et de parvenir à réunir une majorité. Or, depuis les élections de 2023, pour la première fois dans l’histoire de l’Espagne, ce n’est pas le parti arrivé en tête des élections législatives, le parti populaire ( PP) , de droite, qui a formé une majorité, mais celui arrivé en seconde position, le parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) .
L’autre point important de la vie politique espagnole, c’est que, la polarisation de la vie politique espagnole se fait entre le centre, incarné par le PP et le PSOE, et la périphérie, représentée par tous les partis régionalistes ou nationalistes : il s’agit des nationalistes, qu’il soit de droite ou de gauche, de Catalogne, du Pays basque, de Galice et de Valence.
Or, à la suite des élections de 2023, Pedro Sanchez a réussi à former une majorité avec toute la gauche et certains de ces petits partis dits périphériques. Historiquement, la gauche est plus à même de s’entendre avec les formations régionalistes et nationalistes, puisqu’elle partage avec eux une vision fédéraliste de l’État espagnol, alors que la droite incarnée par le PP défend un modèle plus centralisé.
Mais, il ne s’agit pas d’une grande coalition à l’allemande qui repose sur un contrat de gouvernement. Au Parlement espagnol il y a une coalition des partis de gauche et de droite, le gouvernement, lui, est formé de membres des deux partis de gauche, le PSOE et Sumar. Ce qui pose des difficultés pour voter des lois, car les petits partis n’adhèrent pas au projet politique du Premier ministre, leur soutien est uniquement tactique, il consiste à s’opposer au PP.
C’est ainsi que le premier ministre a échoué à faire voter un budget pour 2024 et pour 2025. Aucun budget n’a été voté depuis juillet 2023. Ce Parlement vote des lois qui concernent les affaires courantes, mais il est incapable de mener de véritables réformes , il n’y a plus de majorité politique pour poursuivre dans cette voie.
Alors, comment sont gérées les finances publiques sans budget voté? C’est le budget de l’année précédente qui est reconduit à l’année suivante depuis 2023.
Cela fonctionne plutôt bien car le budget voté en 2023, juste après la pandémie, prévoyait une augmentation des dépenses publiques et comprenait une enveloppe de crédits européens de 72 milliards d’euros à dépenser en investissement, d’ici 2026. L’absence de budget voté reste soutenable, à ce jour. L’économie fonctionne, et la part de la dette dans le PIB diminue. Elle a diminué de 20% en quatre ans pour atteindre 103% du PIB, aujourd’hui 114% en France.
Cette situation est en partie due à l’organisation du pays en communautés autonomes dont les budgets sont constitués essentiellement par des transferts financiers de l’État dans le cadre de la reconduction du budget voté en 2023.
Le principal facteur de cette situation qui joue en faveur de la réduction de la dette réside dans une croissance économique dynamique, 3,2% en 2024.
Quelles sont les raisons de ce dynamisme ?
Elles sont de trois ordres. Le premier facteur de croissance, c’est l’immigration, qui permet un surcroît de consommation est une main d’œuvre qui accepte des salaires bas dans des secteurs professionnels ou les Espagnols ne veulent pas travailler. Le deuxième facteur, c’est le tourisme qui se porte bien depuis la fin de la pandémie. Le troisième, c’est le secteur de l’énergie qui a connu un boom avec la guerre en Ukraine.
L’Espagne s’est lancée dans de gros investissements dans les énergies vertes, surtout solaire grâce à son ensoleillement, ce qui lui permet d’avoir des prix bas. Elle a connu toutefois une panne géante dont l’origine ne semble pas entièrement élucidée. En résumé, l’équation est la suivante : Le déficit est contrôlé par une absence d’augmentation des dépenses faute de loi budgétaire, la dette s’est réduite et le PIB augmente, lui, sous l’effet de la croissance. L’activité génère l’argent public qui permet de rembourser la dette.
Peut-on parler d’un miracle espagnol ? C’est un concours de circonstances qui fait que la conjoncture est favorable malgré un contexte politique incertain qui n’est parvenu qu’à voter des lois de compromis, mais aucune véritable réforme. L’Espagne n’a pas trouvé une formule magique qui soit transposable à d’autres pays européens.
En FRANCE, le mythe des républiques instables.
« Nous sommes revenus à la IV °, voire à la III° République « Maintes fois entendu depuis la dissolution décidée en 2024, ce cri d’horreur interroge. Pourquoi ces régimes font-ils figure de repoussoir aujourd’hui ? Notamment parce qu’ils incarnent, dans notre imaginaire politique, le spectre de l’instabilité gouvernementale décrié. Mais, l’instabilité gouvernementale signifie-t-elle l’instabilité politique ?
Rien n’est moins sûr. En fait, derrière l’instabilité gouvernementale se profile une grande stabilité du personnel politique. Sous la III°, Aristide Briand, par exemple, dirige onze gouvernements différents et, sous la IV °, Robert Schuman est membre de gouvernements successifs pendant plus de la moitié de l’existence de ce régime. Cette stabilité du personnel politique explique la stabilité des politiques publiques : politique scolaire ou coloniale, sous la II° République, planification et construction européenne, sous la V° République. Dans les deux cas, l’instabilité gouvernementale pousse au consensus, et produit in fine une forme de stabilité dans les politiques. La V° a inventé l’alternance et les cohabitations. Mais les institutions ne font pas tout. L’histoire rappelle que la qualité des institutions dépend beaucoup de celle des hommes politiques.
Les institutions de la V° République fonctionnent très bien. La Constitution offre divers outils pour gérer les crises politiques et contribuer à les résoudre : 49-3, vote bloqué, voté de confiance, motion de censure, dissolution, loi spéciale pour reconduire un budget, référendum. Notre Constitution n’est pas responsable de la fragmentation des forces politiques. Au contraire, elle permet au gouvernement de fonctionner en dépit des crises. Alors, pourquoi vouloir changer quelque chose dans notre République ?
Le retour d’une instabilité gouvernementale constitue un nouveau défi. Mais, sous l’effet de la stupeur, ce serait une erreur de changer nos institutions, à deux ans d’une possible reconfiguration des équilibres politiques dans le pays.
Si, les institutions ne sont pas modifiées comment sortir de la crise? La destitution prônée par Jean Luc Mélenchon, selon l’article 68 de la Constitution, n’est pas adaptée et serait d’un usage détourné et elle suppose d’être votée par les 2/3 des parlementaires. La démission ferait perdre, aussitôt son annonce, tout crédit au Président de la République, notamment sur la scène internationale. La dissolution serait prendre le risque d’une future assemblée encore plus fractionnée.
A noter qu’une dissolution à moins d’un an de la prochaine élection présidentielle privera le futur Président du droit de dissolution. Réformer le mode de scrutin pour instaurer une forme de proportionnelle, une simple loi suffirait. C’est prêter des qualités imaginaires à ce mode scrutin d’autant plus qu’il existe de très nombreux systèmes d’élection à la proportionnelle et qu’il faudrait s’accorder sur l’un d’entre eux ce qui sera certainement difficiles. Il revient donc aux responsables politiques de faire collectivement preuve d’inventivité à droit constitutionnel constant.
Depuis 2022, la vie politique française se retrouve prisonnière d’une boucle temporelle qui la ramène inlassablement au même point. Qu’il s’agisse de faire passer une réforme des retraites ou de construire péniblement des budgets visant à réduire les déficits, le pays se cabre, la représentation nationale se fracture et les mêmes questions reviennent. Ainsi, se repose une nouvelle fois, l’épreuve du vote d’un nouveau budget : comment trouver la voie de passage entre ceux qui veulent faire payer les riches, ceux qui pensent qu’il faut réduire les prestations sociales et ceux pour qui la politique anti-immigration suffira à remplir les caisses de la nation. Nous voici revenus fin 2024 !
Pour essayer de répondre à ces questions , il faut revenir à certaines méthodes de la IV ° République qui pourraient être pertinentes aujourd’hui, et oublier, momentanément, l’élection présidentielle de la V° République en faisant des calculs mathématiques et politiques pour faire en sorte que 289 députés ne votent pas une motion de censure sur certains sujets ,et notamment sur le budget, en trouvant des compromis entre les groupes politiques, et que l’élection présidentielle de 2027ne soit pas le seul mobile de leur action, ce qui est peu probable.
Les Belges ne disent pas à leurs enfants « Tu seras Premier ministre », alors ne disons pas à nos enfants « Tu seras Président de la République ».
Ainsi, à l’issue de ce tour d’Europe politique, il est permis de constater que les démocraties européennes ne se portent pas bien, un élargissement de l’étude aux États Unis aurait montré que la situation est la même. Partout, les blocs politiques qui ont gouverné leur pays depuis 1945, après la guerre, sont en grande difficulté et deviennent minoritaires, sauf à trouver de larges coalitions.
Ils doivent faire face à la fragmentation du système politique quel que soit le système électoral, le défi des partis politiques populistes d’extrême droite et de gauche radicale, un sentiment de déception des électorats à l’égard de ces partis traditionnels, et aujourd’hui, c’est nouveau, à des régimes autoritaires et à la politique anti européenne de Donald Trump exposée lors de son récent discours à l’ONU où il a dénoncé le fonctionnement des démocraties européennes.
Nos démocraties seraient elles en danger ?
Comment pourraient se réinventer ?
Ce pourrait être l’objet d’une nouvelle étude.