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L’Italie vieillit, l’Europe aussi, les solutions pour résoudre la bombe démographique italienne peuvent-elles servir d’exemple pour l’Europe ? par Guy MALHERBE, ancien député de l’Essonne

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##. L’Italie vieillit, sa population se réduit et bat un record négatif de naissance.

L’Italie vieillit et se dépeuple. Mais il existe une autre cause du dépeuplement italien : c’est l’émigration croissante des italiens, et surtout des plus jeunes. Ce mouvement enregistré depuis 2008 n’est plus conjoncturel suite à la crise financière, mais structurel.

Depuis 20 ans, 1,64 millions italiens sont partis pour 867 000 retours, soit un solde négatif de 817000 personnes. Ainsi, 6,4 millions d’italiens vivent à l’étranger, plus du double depuis 2006. Ce chiffre tient compte du phénomène de l’acquisition automatique de la nationalité italienne par les descendants d’émigrés italiens installés en Argentine et au Brésil essentiellement.

En 2024, ce mouvement c’est accéléré avec un solde négatif de 103 000 italiens, un record. Plus de 72% des émigrants ont moins de 50 ans, et les 18-40 ans en représentent 60% alors que cette classe d’âge s’est réduite de 3 millions de résidents du fait de la baisse de la natalité. Une étude a mis en relief que désormais, ne partent pas seulement les aventuriers, mais surtout ceux qui ne trouvent pas en Italie les conditions minimales pour vivre et dans la tranche des 25-35 ans les partants sont les plus diplômés. L’Italie n’est pas un pays pour les jeunes : salaires faibles, précarité, carrières lentes et une certaine gérontocratie.

Même les nouveaux italiens récemment naturalisés partent et en particulier les plus jeunes qualifiés. Ils partent rejoindre des communautés d’origine dans d’autres pays européens et pour saisir de meilleures perspectives professionnelles. Le Top des destinations de tous ces italiens est dans l’ordre décroissant : Allemagne, Royaume Uni, Espagne, Suisse, France, Brésil, États Unis, Argentine.

Et ce mouvement de l’émigration ne se concentre pas dans les régions méridionales moins prospères mais il touche les régions les plus productives comme la Lombardie et la Vénétie, des régions riches et peuplées.

Cette dynamique migratoire qui accentue le vieillissement et la contraction démographique fait qu’après un pic de 60,3 millions d’italiens, en 2014, l’Italie pourrait ne compter que 55 millions de citoyens en 2050. Cette dynamique fait que la population en âge de travailler (15-64 ans) devraient fortement baisser dans les prochaines décennies. Il pourrait y avoir 8 millions de travailleurs en moins si rien n’est fait.

Cette dynamique augmente la pression pour avoir de l’immigration « utile » : des travailleurs non – européens pour combler une partie de la baisse de la population. Le patronat italien et les syndicats poussent dans ce sens pour pallier le déclin démographique et répondre à la pénurie de main d’œuvre dans plusieurs secteurs (agriculture, tourisme, construction, santé, dépendance…) Selon certains observatoires économiques italiens pour maintenir une stabilité économique (rapport entre la population active et population totale) l’Italie pourrait avoir besoin de 10 à 13 millions d’immigrants nets d’ici 2050.

Entre 2023 et 2025, le gouvernement Meloni a mis en place un plan de 452 000 titres de séjours pour accueillir des travailleurs non européens venant des pays du Maghreb en fonction des besoins du marché du travail. Un décret gouvernemental prévoit 497550 nouveaux visas de travail sur la période 2026-2028. 164 850 visas sont prévus pour 2026. Depuis 2025, certaines procédures sont simplifiées et la signature des documents peut se faire en ligne pour réduire les contraintes bureaucratiques et les délais. La durée du renouvellement a été prolongée. Ces quotas ont été construits en fonction des besoins réels exprimés par les partenaires sociaux : entreprises et syndicats. Certains syndicats jugent que les quotas ne sont pas suffisants ou pas bien calibrés.

Ces plans pourraient voir une stabilisation partielle de la population active d’ici 2030 -2035 dans des secteurs cruciaux. Ils permettaient de réduire la pénurie de main d’œuvre, de limiter la baisse de productivité et d’alléger les tensions sur le financement des retraites les régimes sociaux sans les supprimer.

La réussite de ces plans est jugée indispensable pour résoudre la bombe démographique à court et à moyen terme. Accueillir c’est aussi investir dans le logement, la formation, la reconnaissance de qualification, apprentissage linguistique, l’ecole, l’intégration.

##. ##. L’Europe des 27 vieillit, aussi, ce n’est pas une crise passagère. Le défi démographique est structurel, comme en Italie les tendances sont bien ancrées.

L’Union Européenne compte environ 449 millions d’habitants. Elle se maintient malgré un solde naturel négatif car elle est soutenue par l’immigration. Le nombre de décès est supérieur au nombre de naissances. Le taux de fécondité de 1,38 enfant par femme en 2023 est inférieur au niveau de remplacement de 2,1. L’âge moyen des mères ayant leur premier enfant augmente en 2023, il était de 29,8 ans. Le pourcentage de personnes âgées, + de 65 ans, augmente dans tous les États membres. Un tiers de la population pourra être retraitée en 2050.

L’espérance de vie s’accroit a un niveau élevé et contribue au vieillissement de la population. Ce qui en soit est un gage de qualité de vie dont il faut se féliciter et l’apprécier. Mais, cette longévité impose des coûts de soins et de retraite croissant sur les systèmes sociaux. Certaines régions perdent des habitants, ce qui accentue les déséquilibres régionaux comme en Italie.

Le vieillissement menace la soutenabilité des systèmes de retraite. Les dépenses de santé et de soins de longue durée vont augmenter avec une population vieillissante. La diminution du nombre d’actifs en âge de travailler risque de ralentir la croissance économique. La pénurie de main d’œuvre dans certains secteurs économiques risque de freiner la production et l’innovation. Des tensions intergénérationnelles peuvent apparaître : plus de retraités à financer avec moins de jeunes actifs pour travailler et financer. L’immigration pourrait compenser les pertes démographiques avec des politiques d’accueil et d’intégration (emploi, formation, logement). Mais il y a des résistances politiques et sociales à des flux migratoires importants dans certains pays.

Si, 1,5 millions d’européens de l’UE déménagent dans un autre pays de l’UE, mobilité intra européenne, L’émigration des européens de l’UE vers des pays hors UE doit être prise en compte. Environ, 1,0 million d’européens ont émigré en 2022 depuis les pays de l’UE vers des pays non UE. C’est un nombre stable. Parmi ces émigrants hors UE, les plus gros points de départ incluent : l’Allemagne environ 160 000, l’Italie 155 000 en 2024, 270 000 sur la période 2023-2024, la France environ 140 000, l’Espagne 99 000, la Pologne 92 000. Il s’agit de jeunes actifs entre 20 et 40 ans, diplômés cherchant des opportunités dans d’autres pays. Ces départs contribuent au vieillissement de la population et à la perte d’actifs diplômés sur le marché du travail.

L’inaction face à ces tendances démographiques structurelles et incontournables fragilisera la compétitivité économique, le financement des systèmes de protection sociale et de santé des européens.

Pour faire face à ces défis plusieurs pistes sont évoquées : relancer la natalité, adapter les systèmes de retraite et de santé et gérer l’immigration.

Pour cela, l’Italie ne pourrait-elle pas être un exemple à suivre et à adapter.

Pour l’Europe plusieurs scénarios seraient possibles : avec une faible migration , 0,5 M/ an ,ce scénario serait incapable de compenser le déclin naturel, avec une migration moyenne , 1,0 M/ an, ce scénario pourrait apporter une stabilisation relative de la population active et améliorer la soutenabilité économique avec en contrepartie un effort important d’intégration, avec ,enfin, une migration plus ambitieuse de 1,6 M/ an, ce scénario améliorerait le rapport retraites / actifs, les finances publiques, le financement des retraites et le marché du travail, mais il suppose un effort politique et social important : accueil, logement, formation, reconnaissance des diplômes et pose des défis d’intégration.

Si l’immigration peut, demain, comme l’exemple italien le montre, compenser une large partie du choc démographique, son efficacité dépend toutefois de la taille des quotas, de la composition (jeunes, diplômés, adaptés aux besoins) et surtout de l’intégration (emploi, logement, formation) et une bonne répartition territoriale entre les pays les plus affectés et en complémentarité une amélioration du taux d’emploi des jeunes, 18-25 ans, et des seniors au-delà de 55 ans.

##. ##. Alors, l’Italie, un cas particulier en Europe, ou un exemple pour l’Europe ?

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